Il faut reconnaître à Michaële-Andrea Schatt cette intuition des correspondances qui caractérise toute son œuvre. C'est que l'artiste, quels que soient les sujets dont elle s'empare, en tire toujours le fil avec détermination pour en détricoter les contours et en dénuder l'essentiel. Entre ses mains, un kimono redevient paysage ; les frondaisons d'un jardin se muent en une broderie fantastique de couleurs et d'arabesques. Du plus vernaculaire des objets (une coiffe africaine) au plus universel des topoi (une forêt, une trame, la forme d'une fleur), tout ici se mélange, tout s'anime et s'enflamme. Et pourtant, tout cohabite en paix.
Appréhendant la peinture comme un langage, c'est-à-dire un ensemble de signes hétérogènes qui, une fois assemblés, permettent de figurer à autrui une expérience particulière, Michaële-Andrea Schatt reconstruit des mondes par hybridations et reports successifs (l'artiste peint essentiellement par empreintes sur la toile). Ce faisant, son œuvre pose une nouvelle distance, propre à révéler les formes les plus saillantes de nos idiomes culturels et de nos obsessions individuelles. Un peu comme le ferait la mémoire en ses réminiscences, dont la teneur anecdotique et schématique renferme pourtant les plus intimes de nos secrets, dissimulés dans l'évidence "comme un motif compliqué dans un tapis persan"*
Thibault Bissirier, mai 2020
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* Henry James, "Le motif dans le tapis", 1896.
Michaële-Andréa Schatt, DJ's Garden, 2020
Techniques mixtes sur toile, 180 x 150 cm
(Courtesy artiste & Galerie Isabelle Gounod)
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